Parole de Charlotte Poncin, feat. Melbas 801

Parole de photographe, c’est un entretien privilégié avec un photographe professionnel au savoir-faire affirmé. L’occasion de découvrir le parcours, le quotidien et les réalisations d’un photographe inspirant.

Pour ce vingt-deuxième Parole de Photographe, nous vous présentons Charlotte Poncin et son projet Melbas 801, un duo qui a la pêche !

Son parcours

Bonjour Charlotte, merci de nous rejoindre pour ce vingt-deuxième Parole de Photographe. C’est parti pour la présentation d’usage !

Bonjour Pierre-Louis, et merci beaucoup de m’avoir conviée pour l’un de vos Parole de  Photographe ! Je me nomme Charlotte, mais tout le monde m’appelle Chacha. On me connaît surtout, professionnellement, sous l’entité MELBAS 801 que je gère avec mon compagnon Kévin, qui est scénariste et réalisateur.

Je suis originaire de Nouvelle-Calédonie et j’ai vécu quelques temps en Australie avant de me baser à Montpellier en 2011. Je suis une hyperactive intenable. Je suis photographe certifiée European Photographer, infographiste, enseignante et productrice de films. J’ai un parcours un peu atypique je dirais, mais qui m’a menée à me créer un réel équilibre professionnel tel que je l’entendais, me permettant d’expérimenter sur de nombreux formats et de faire des rencontres inattendues.

  • D’un côté, je suis photographe travaillant aussi bien pour des particuliers que pour des professionnels. ma spécialité est le Portrait Artistique mais je crée des images dans différentes disciplines : le Book Mannequin / Comédien, le Mariage, le Roman-Photo, la Mode, le Reportage et la Photographie de plateau (tournage)… J’ai un profil très généraliste, mais j’ai le même degré d’expertise / d’exigence dans chaque domaine.
  • De l’autre côté, je produis, avec mon compagnon, des vidéoclips musicaux ainsi que du contenu de fiction, à des fins de distribution en festivals internationaux. C’est une partie que nous développons beaucoup. Nous faisons également bien sûr de la prestation vidéo et de réalisation, plus globalement. Pour nous, photographie et vidéographie sont absolument complémentaires dans notre activité globale.
  • Et enfin, je garde un peu de temps pour l’enseignement, cela me passionne. J’enseigne la Photographie et l’Anglais. J’ai enseigné dans différents établissements supérieurs sur Montpellier depuis 2016, et j’ai régulièrement des élèves en cours particuliers.

Cela a le mérite de poser les bases ! Et au-delà de ce programme hyper-dense, trouves-tu du temps pour des activités secondaires ?

Concernant mes centres d’intérêt au-delà de la photographie, outre forcément le cinéma et l’univers du clip vidéo, je peux mentionner la lecture, l’histoire et la sociologie, l’amour des animaux, mon activité professionnelle de modèle (modèle vivant, muse pour peintres et dessinateurs de BD) et, par-dessus tout, mon amour inconditionnel pour les chevaux.

Cet entretien démarre très fort ! Place à tes débuts dans la photographie : comment es-tu entrée dans ce monde ?

J’ai commencé à apprendre la photographie il y a 8 ans, mais c’était une matière très secondaire dans mon cursus d’études (dans une école d’art digital et de cinéma d’effets spéciaux… C’était dans une autre vie !). Pendant quelques années, je ne devais toucher un appareil photo qu’une ou deux fois par mois, sans plus. Mon activité de modèle était clairement plus développée.

C’est durant l’été 2017 que je me suis lancée un peu plus sérieusement. J’utilisais la photographie comme thérapie après une période difficile sur le plan personnel, j’aimais surtout le dialogue avec les personnes impliquées. J’ai travaillé dur pour atteindre un niveau satisfaisant pour me lancer en tant que professionnelle, et j’ai officialisé la chose en début 2018, tout en créant notre structure avec mon compagnon.

Concrètement, je me considère photographe professionnelle, et photographe tout court, depuis seulement 3 ans. Je me remets constamment en question et travaille dur, n’ayant pas eu de formation technique à proprement parler. Bien entendu, beaucoup de choses, d’aspects différents, peuvent pousser quelqu’un à se professionnaliser. Dans mon cas, je miserais sur le fait que j’avais enfin trouvé mon medium de création préféré après un long tâtonnement. Cet équilibre que représente cette profession pour moi, entre le rapport à autrui, le dialogue, la technique et les vecteurs variés que nous offre désormais le monde digital, est ce qui a le plus orienté ma décision.

Tu viens déjà de donner pas mal d’informations à ce sujet, as-tu des éléments à ajouter concernant ton parcours professionnel ?

Après le BAC, j’ai d’abord préparé et obtenu la certification CAE (Cambridge Certificate in Advanced English) pour attester de mon niveau d’Anglais professionnel. Je ne le répéterai jamais assez (à mes étudiants  notamment), il est primordial de travailler son anglais pour ouvrir certaines portes. J’ai ensuite fait 4 ans d’études d’infographie dans une école de cinéma et d’art digital, pour au final ne pas avoir du tout envie d’aller travailler en studio de post-production… Je ne voulais pas travailler sur les images des autres, mais créer mes propres images.

Suite à mon diplôme, je me suis lancée comme vidéaste /  documentariste, mais au bout d’un an c’est la photographie qui m’a embarquée avec elle. Je me considère autodidacte en photographie et production de films, du moins pour les activités que je mène, intrinsèquement.

Quant aux étapes majeures dans ma carrière :

  • J’ai eu en fin 2018 ma première nomination à l’international pour du Portrait Artistique (Photobox Instagram Photography Awards).
  • En 2019 j’ai senti que j’avais bien progressé techniquement, même si je ne travaillais pas encore vraiment avec de la lumière studio classique, je bidouillais des trucs avec de la lumière continue. C’était l’année de mes premières publications magazine régulières (notamment mes premiers pas avec Vogue Italia), et j’ai eu le plaisir de terminer Finaliste dans deux catégories aux Médailles de la Photographie Professionnelle Française 2019, pour ma première participation (sections Commercial et Digital Art)!
  • J’ai eu d’autres péripéties… Notamment j’ai été traductrice live sur 2 jours pour une commission officielle de l’UNESCO en fin 2019 ! Une de mes meilleures expériences professionnelles. 
  • En Mars 2020, nous partions en confinement… Et j’ai appris que j’avais obtenu le titre d’European Photographer auprès de la FEP, j’étais vraiment très heureuse de ce nouveau pas ! Du coup on a fêté ça dans le salon et j’ai réveillé mes parents juste pour leur annoncer en visio (9h de décalage… on fait comme ça pour les grandes  occasions !). Depuis, je redouble d’efforts pour mes nouveaux  objectifs professionnels.
  • Enfin, étape majeure dans ma carrière, et complètement partagée avec mon compagnon, c’est l’aspect « distribution » de nos clips vidéo, que nous réalisons ensemble. « JUNGLE URBAINE », qui aborde les amours perdus et l’univers urbain nocturne, a fait le tour du monde en festivals internationaux et nous a ramenés 5 prix ! Nous avons un autre clip actuellement en distribution depuis Février, « SANS FIN », plan-séquence nocturne, qui traite d’une relation abusive dans un jeune couple, et c’est un tournant pour nous puisqu’il a été en sélection officielle dans 4 prestigieux festivals internationaux jusqu’ici. De belles surprises pour nous puisqu’il s’agit de projets à petits budgets, nommés aux côtés de plus grosses productions de la scène internationale ! C’est très boostant. Cela nous a menés à être même diffusés sur la chaîne américaine Comcast.

Son style

A travers cette impressionnante liste de réalisations et de consécrations, comment définirais-tu ton style de photographe ?

Mes photos résultent presque toujours d’une démarche cinématographique je dirais… J’aurais plus de facilité à parler de ma philosophie que de mon style, pour la simple raison que je touche à tellement de genres photographiques variés, hyperactive que je suis, que j’adapte mon style au  genre, assez mécaniquement.

Mais le dénominateur commun de toutes mes images est, je pense, une alliance entre approche  épurée et obsession du contraste. Ma philosophie est basée sur la bienveillance, le dialogue et la  discipline. Je commence tout projet par une mise en confiance et un dialogue le plus efficace et transparent possible. J’aime l’aspect profondément humain des métiers de l’image, et je pense  beaucoup me nourrir de cela.

Mais j’ai en moi un côté organisationnel / leadership aussi très  prononcé. Sur un photoshoot ou tournage, je vais être certes extrêmement exigeante avec mes collaborateurs, mais tout comme je  le suis avec moi-même, avec le sourire et dans une recherche absolue de confiance et respect mutuels.

Ses anecdotes

Aurais-tu une anecdote marquante à nous partager en lien avec ton activité de photographe?

C’est très dur à dire ! J’ai eu beaucoup de souvenirs très marquants. En fait, en tant que  photographe, je pense que c’est la capacité de mes clichés ou d’une de mes démarches à provoquer de l’émotion qui forge mes meilleurs souvenirs. Quand mes mariés découvrent le reportage et qu’ils voient une photo touchante à laquelle ils ne s’attendaient pas du tout, ou quand, plus récemment, une jeune modèle de 12 ans que j’ai eu le plaisir de photographier tient dans ses mains un magazine australien de mode pour lequel elle fait la couverture parce que j’ai soumis l’édito au magazine et qu’il y a eu un alignement des étoiles…

Ce sont des moments précieux. Ou encore, dans un autre contexte, récemment, j’ai eu l’opportunité de mener un projet photo pour une bijoutière allemande, en Italie… et j’ai photographié une dame merveilleuse de 91 ans qui avait accepté de poser nue avec les bijoux… cette expérience unique m’a énormément marquée et inspirée.

Last but not least, ma rencontre avec Alice, qui est depuis notre maquilleuse / coiffeuse / perruquière sur quasiment tous nos projets, est un merveilleux souvenir également. Nous lui devons beaucoup dans la direction artistique de nos projets photo et film ! Et j’ai beaucoup de chance de l’avoir comme amie.

Nous voici arrivés à mon moment préféré : le partage de l’une des photos les plus marquantes de ta carrière !

Cette question est extrêmement difficile pour moi ! J’ai vécu tellement de moments forts avec des modèles, des clients… dans des situations allant de l’inattendu ou inespéré à l’ubuesque complet !

Mais je pense que LA photo, c’est un auto-portrait que nous avons signé ensemble avec Kévin. On nous y voit nous enlacer. C’est la première photo officielle estampillée MELBAS 801, nous venions d’emménager ensemble, avec l’idée de lancer une boîte… Si je suis photographe aujourd’hui, c’est grâce à lui. Il m’a poussée à me lancer, il m’a offert mes premières lumières studio… Je ne ferais pas tous ces projets aujourd’hui s’il n’avait pas été là.

Il y a quelque chose dans le rendu graphique de cette photo,  puisque j’en ai assuré la post-production, que je n’avais jamais obtenu auparavant. Cette photo est très symbolique pour plein de raisons !

Ses projets

Nous arrivons déjà à la fin de ce vingt-deuxième “Parole de Photographe”. L’occasion de nous parler de tes projets dans les mois à venir !

J’ai une série photographique très intime que j’aimerais concrétiser afin de faire ma toute première exposition en fin 2021… Je vous avoue que ces mois-ci, ce sont 2 projets de films qui me prennent le plus clair de mon temps, quand je ne suis pas avec mes clients ! (je partage avec vous les affiches promotionnelles !)

D’ailleurs, les 2 projets en question sont directement liés à la photographie… Nous sommes sur la fin de production de notre court-métrage engagé, « INSU », dont je suis la productrice. Nous souhaiterions faire l’avant-première en Mars 2021. Le film est dédié au thème du droit de la femme à disposer de son corps, nous y suivons une jeune modèle. À-travers le prisme du milieu
photographique, nous avons souhaité dénoncé un problème global déclinable dans de nombreux milieux, et plus qu’actuel. Notre film s’inspire directement de témoignages que certaines de mes modèles, de nos actrices ou collaboratrices dans l’audiovisuel, ont partagé avec nous. Nous travaillons dur sur ce projet depuis 2 ans, j’ai donc vraiment hâte que nous puissions l’utiliser enfin comme outil de sensibilisation / dénonciation. Les thèmes sous-jacents principaux sont le consentement et le rapport au corps.

Enfin, nous sommes également, via une autre société nommée PROCESS 801, avec mes deux associés Kévin (encore lui !) et le photographe Etienne CLOTIS (Master Qualified European Photographer), sur un projet de long-métrage adapté d’une BD française à succès (par Hubert et Burckel) : « LA NUIT MANGE LE JOUR ». Il s’agit d’un projet engagé LGBT, mais surtout d’un thriller haletant abordant la question suivante : « Comment exister dans le regard de l’autre ? ». Nous préparons le tournage pour le 1er trimestre 2021, et nous sommes réellement épris de l’histoire, de ses personnages, et des possibilités esthétiques qu’offre cet univers ! Il y a un rapport extrêmement fort à la Photographie dans ce film et dans son processus de création… je vous invite à lire la BD ou à suivre les coulisses du projet de film pour en savoir plus !

Un dernier mot ?

J’aimerais encourager toute personne n’ayant pas encore réellement trouvé son ou ses mediums d’expression à continuer à tâtonner, à expérimenter… C’est en trébuchant (en me faisant très mal parfois), en changeant parfois radicalement de cap, que j’ai fini par me créer mon propre équilibre.

Dans un monde qui va trop vite, où nous sommes sur-stimulés par les informations, je pense qu’il est important de savoir s’écouter, de rester fidèle à soi-même, et de s’adonner à ce qui nous passionne réellement. Au final, quand on trouve ce qui résonne le plus en nous, ça en vaut tous les sacrifices et toutes les nuits blanches !

Je tiens à remercier l’équipe de Label Photographie pour cet entretien, et plus globalement pour tout leur travail afin de promouvoir notre belle profession !

Où trouver Charlotte Poncin ?

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